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fleur fanéeAu lendemain de la demi-finale du « Tremplin de la chanson », au Forum Léo-Ferré, l’ami Jean Dubois publiait sur un réseau social où nous aimons palabrer une courte vidéo dans laquelle il rappelait, avec un air accablé, que le mot « fleur » ne prend pas de « e » final. C’était là une évidente allusion à ce qu’il avait, comme moi, entendu la veille, lors de cette demi-finale, de la part d’un candidat parsemant le refrain de sa chanson de cette formule que sa prononciation rendit exaspérante : « Petite fleureu qui se fane. »
Pour cette édition annuelle du concours, les amis organisateurs de l’association Initiatives Chansons m’avaient demandé d’intégrer le comité d’écoute chargé de sélectionner quatorze demi-finalistes parmi les 145 candidats. J’avais donc déjà pris soin de noter ceux d’entre eux, hélas de plus en plus nombreux parmi les jeunes artistes, qui semblent avoir de sérieux problèmes soit avec l’orthographe, soit avec le style syllabique de la composition musicale.
Il est devenu flagrant, en effet, que nombre d’entre eux introduisent désormais dans leurs chansons, sans complexes et parfois avec « ardeure », qui le « trottoire », qui le « bonheure » ou autre « espoire ». Pour les oreilles du siècle dernier, quelle « douleure » !
Le plus cocasse, c’est que lorsqu’on évoque cet aspect de l’écriture avec lesdits jeunes gens, il n’est pas rare de prendre illico un sacré coup de vieux devant leur expression hallucinée. Ils semblent alors vous voir soudainement sorti tout droit d’une étagère poussiéreuse remplie d’ouvrages savants sur la langue de Littré, une sorte de chipoteur excessif revêtu de l’habit vert d’un académicien-français au bord de la tombe.
On savait l’orthographe-grammaire mal en point. Si la chanson se met à participer au désastre, ça ne va pas s’arranger, j’en ai bien « peure »…

Floréal Melgar

9 commentaires »

  1. GIACOMETTI dit :

    Tu as raison, floréaleu

  2. Un partageux dit :

    Dans un courriel adressé à un groupe j’ai rebaptisé nos petits chefs fauxcialistes locaux du nom de « satrapes ». J’aurais pu utiliser « caciques », « hiérarques », « archevêques » ou nombre d’autres synonymes rigolos.
    En retour hier soir je prends une claque. Un jeunot, il doit tout de même dépasser la trentaine, me reproche d’employer des mots compliqués que « les jeunes ne comprennent pas ».
    Bien sûr il n’a pas songé à consulter un dictionnaire et me reproche une suggestion aussi loufoque. « Merde, je suis un djeun’, moi, pas un rat empoussiéré dans une bibliothèque. »
    Je lui rétorque que l’Asie mineure, avec ses Perses, ses Assyriens et autres peuplades antiques de Mésopotamie, était au programme de la classe de sixième quand j’y usais mes fonds de culotte. Et que c’est sans doute à l’âge de onze ans que j’ai appris ce mot satrape que mon fils (quatorze ans) emploie bien volontiers quand il fait comme moi de l’ironie à pleine charrette…
    Mon gars me gourmande. [Non, là, je galège, il maîtrise pas un tel mot.] C’est qu’il en a mal à la tête de tout ce vocabulaire inconnu, de ces Assyriens (les quoi ?) et de toutes ces références qu’il ne connaît pas.
    Ah ! Suis-je distrait ! J’ai oublié de vous préciser que mon jeune trentenaire est professeur de collège.

  3. Sarclo dit :

    Si on se réfère à des gars qui ont une écriture un peu actuelle, Orelsan, Adamus, Lantoine, Jules, on voit bien que les E muets lourdingues appartiennent aux années septante. Point.

    • Bruno Ruiz dit :

      C’est quoi « une écriture un peu actuelle » ?

    • administrateur dit :

      Les « e » muets « lourdingues » n’appartiennent pas seulement aux années septante, c’était encore bien pire avant! Aujourd’hui, à mon avis, les « e » muets » sont lourdingues s’ils sont trop marqués, lorsqu’ils deviennent trop sonores, mais on peut aussi les chanter légèrement, discrètement pour des raisons rythmiques. On peut aussi, bien sûr, les ignorer et même élider tous les « e » sonores comme souvent dans le langage parlé quotidien, c’est une option. On peut chanter comme on parle ou non, c’est un choix et une question de goût. (Chanter comme on parle tous les jours permet aussi de ne pas se casser la tête avec les problèmes de versification.) (Pierre Delorme)

  4. Norbert Gabriel dit :

    Salut, il y a quelques années un ACI nous a offert un plateau particulièrement fourni, je cite de mémoire, « le ciel-le sur les por-re, les trottoi-res, peut-être un mirado-re, mais il y avait du soleil-le sur le po-re, ça c’est sûr, et je dois en oublier… ça m’a fait peu-re pour l’avenir de la langue française, mais le pire s’est confirmé…

  5. André ROBERT dit :

    Avec « J’ai demandé à la lune » Indochine faisait pi-re. « On était tellement sûrs » devient « On était tellement su-u-re »

  6. Norbert Gabriel dit :

    On a eu aussi Trenet « hier soir-re » dans « La folle complainte » ce que Barouh et Higelin ne font pas en décalant façon jazz..

  7. Isaac Attia dit :

    Il est vrai que rajouter par ignorance un « e » final à certains noms dénature le sens des mots et provoque des confusions qui frôlent parfois le ridicule. Il en est ainsi du « bon heureux » qui n’a rien du « bonheur » ou du « douloureux » qui n’est plus la « douleur ». Mais je voudrais signaler un cas magnifique d’ajout d’un « e » sonore à la préposition « avec ». On se souvient du merveilleux usage de cette préposition par Léo Ferré : « Avec le temps… Avec le temps va, tout s’en va… ». Dans, « Le Blason », Brassens a transformé le ton sec et claquant de cette préposition, en rajoutant un « e » (empruntant ainsi la forme ancienne, « avecques », que l’on retrouve dans certains textes du 17e siècle). Et cela donne une variante de la préposition « avec » qui ne tombe pas dans la confusion et prend, tout à coup, une noblesse infinie :
    « Ayant avecques lui toujours fait bon ménage
    J’eusses aimé célébrer sans être inconvenant
    Tendre corps féminin ton plus bel apanage
    Que tous ceux qui l’ont vu disent hallucinant ».
    Une adéquation parfaite avec la mélodie et une formulation de départ suffisamment étrange pour créer le désir d’en savoir plus : « Ayant avecques…..lui ». Et tout cela pour finir par la merveilleuse formule qui ravit, émeut et fait réfléchir à la fois : « Que tous ceux qui l’ont vu disent hallucinant ». La perfection des couplets de Brassens qui comportent chacun une intro originale ménageant le suspense, une intrigue centrale et une formule finale, m’incite à penser qu’une des caractéristiques du savoir-faire de Brassens que l’on ne retrouve pas chez les autres auteurs, c’est que chaque couplet d’une chanson de Brassens est une chanson à part entière.

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