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Peinture de Fu Baoshi

Les artistes méconnus sont parfois l’objet des réflexions des amateurs de chanson qui s’interrogent sur leur absence de reconnaissance auprès du grand public et essaient de comprendre ce qui leur a manqué pour réussir.
Les opinions sont très diverses à ce sujet et hormis celles très tranchées des militants de la CFQ qui considèrent que « leurs » artistes sont forcément des victimes du show-business et donc du système capitaliste, ces opinons sont souvent dubitatives et prennent la forme de questions, d’hypothèses.
Au sujet d’un tel ou d’une telle, on imaginera que, peut-être, il lui a manqué un compositeur. Ses mélodies ne sont-elles pas toujours un peu les mêmes ? Celle-ci, un peu trop bavarde, n’aurait-elle pas gagné à travailler avec un parolier ? Parfois, le manque concerne tout bonnement le physique de la chanteuse (Françoise Hardy à propos de Maurane !).
Le manque concerne rarement l’élément pourtant essentiel chez un artiste chanson : la voix. Il est vrai que dans ce domaine il est impossible de s’aventurer tant les voix diverses et variées « réussissent », même les plus atypiques, voire les plus invraisemblables. Pourtant, celle d’Anne Sylvestre ne l’a-t-elle privée d’une carrière plus aboutie ?
Bien sûr, pas de réponses à ces questions, « on ne saura jamais », comme disait Allain Leprest, dont on peut se demander si un autre compositeur lui aurait permis de connaître le succès, si comme Jean-Roger Caussimon il avait trouvé « son » Léo Ferré, ou encore Jacques Brel « son » Gérard Jouannest ? « Jamais on le saura », notons que pour cette chanson (C’est peut-être), qui est la plus « célèbre », la musique est de Richard Galliano, grand musicien devant l’Éternel, également compositeur parfois pour Claude Nougaro (Vie violence). Ceci explique peut-être cela.
Pour un même artiste, les opinons quant à ce qui lui manque pour connaître le succès peuvent varier selon les « experts »… ce qui n’est pas étonnant tant les éléments sont nombreux qui forment l’œuvre d’un artiste chanson. Chacun analyse un peu en fonction de ses marottes, de sa sensibilité, de l’intérêt qu’il porte aux mélodies, à la poésie du texte, au rythme, au style musical, à l’harmonie, à la présence scénique, etc.*
Certains éléments sont sans doute défaillants ou absents chez les artistes, mais peut-être que ce qui manque le plus souvent c’est le ciment pour les faire tenir ensemble de façon cohérente, comme les briques d’un mur. Chaque élément pris séparément peut être bon ou moins bon, il faut le ciment de la cohérence. Et encore faut-il ne pas oublier le fil à plomb pour que tout ça tienne debout ! Bien sûr, ce ciment-là, tout le monde le cherche, mais il est rare et reste une abstraction bien peu définissable. Il est invisible comme les ajours dans la dentelle ou encore les « vides » dans la peinture chinoise qui structurent tout l’ensemble.

Pierre Delorme

* Une anecdote personnelle : En tant qu’auteur-compositeur-interprète sans succès notable, j’ai entendu à peu près tout et son contraire quant à ce qui me « manquait », la palme revenant toutefois à une dame qui un jour m’a dit qu’il me manquait la « roublardise » ! L’absence de roublardise, là, ça n’est plus un manque, c’est carrément un handicap !

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