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Paul Verlaine

Paul Verlaine

C’est drôle la vie, je veux dire celle qu’on vit avec les chansons. Arrivé à un certain âge, on se contente bien souvent de ses souvenirs, de ses histoires d’amours anciennes avec telle ou telle chanson. Bien sûr, on s’intéresse à celles des petits jeunes, des nouveaux venus, on se prend même à vibrer encore pour certaines, mais bon… soyons justes, on est obligés de se forcer un peu. C’est surtout pour dire de ne pas passer pour un « vieux con », scotché à ses rossignols (et crapauds !), dans une sorte de bazar foutoir où il n’y a plus beaucoup de place pour les nouveautés. Bref, on ne tombe plus guère amoureux d’une chanson, ou alors moins souvent et moins fort, ou même plus jamais. Ne me dites pas le contraire, je ne vous croirais pas, ou alors c’est que vous ne savez pas ce que c’est qu’être amoureux d’une chanson.
Je me croyais personnellement à l’abri de ce genre de mésaventure, j’ai déjà beaucoup donné dans ma jeunesse, mais là, pourtant… J’ai acheté une réédition du 
Verlaine et Rimbaud chantés par Léo Ferré, illustrée par le dessin de Maurice Frot*. La réédition est de qualité, agrémentée d’un beau livret où l’on peut lire les poèmes chantés par Léo. Bien sûr, je les connaissais toutes, ces « chansons » enregistrées en 1964. Mais voilà qu’au détour de l’écoute une des chansons, que je n’avais jamais remarquée spécialement, m’a saisi au cœur, d’un coup, effaçant les autres du paysage. Comme si depuis 1964 elle attendait son heure pour venir vivre son histoire d’amour avec moi. Ça n’est peut-être pas la plus belle, ni la plus remarquable, elle est discrète cette chanson-là, comme la fille qu’on n’avait jamais vue dans la cour du lycée et qui un beau jour vous regarde… Alors, vous ne pouvez plus détacher votre regard du sien. C’est pareil, et ce soir je suis amoureux de Je vous vois encor… un poème écrit par Verlaine et chanté par Léo, qui a ajouté des petits la la la à la fin de chaque strophe, pour nous rappeler qu’il s’agit d’une chanson. C’est très doux, un peu voilé. Je suis en quelque sorte amoureux à retardement, comme quoi rien n’est jamais perdu. Tout est affaire de patience. Et comme le chantait un autre « grand » de cette époque :

On a beau faire, on a beau dire
Qu´un homme averti en vaut deux
On a beau faire, on a beau dire

Ça fait du bien d´être amoureux
(Jacques Brel, 
Le Prochain Amour)

Pierre Delorme

* Maurice Frot était un ami de Léo Ferré, une sorte d’homme à tout faire de ses tournées. J’ai eu la chance de le connaître un peu et de boire des coups en tête-à-tête avec lui, dans des bars, la nuit, « devant la bière allemande, avec des problèmes d’homme et de mélancolie », comme l’avait écrit son cher Léo (Richard). Salut Maurice.

Ecoutez la chanson bien douce :

4 commentaires »

  1. Caroline Ruelle dit :

    Très beau… Pour ma part je tombe encore amoureuse souvent, d’hommes comme de chansons, et je compte bien que ça ne diminue pas, qu’avec le temps cela ne s’en aille pas…

    • administrateur dit :

      Hélas, le même chanteur a chanté « Avec le temps, va, tout s’en va », mais bon… Chansons que tout cela ! 🙂

  2. bruno Ruiz dit :

    Oui Pierre. Je suis d’accord sur tout ce que tu écris là. Sauf pour le coup de foudre pour « je vous vois encore » que j’ai eu il y a bien longtemps déjà. Elle faisait partie de mes préférées de Verlaine à l’époque où j’ai découvert ce disque vers les années 1970. Mais ça me l’a fait pour d’autres et c’est bien agréable…

  3. Un partageux dit :

    Je ne vais pas ergoter sur les propos de Pierre qui sont sans doute assez justes. Mais il faudrait aussi ajouter une dimension qui a disparu. On ne chante plus. Ni au boulot, ni en famille, ni avec les copains, ni…

    Si je connais des paquets de chansons « parisiennes » (Paul Delmet et cie) et tant de chansons traditionnelles gallaises c’est parce que ma grand-mère les chantait. Si je connais tant de chansons des années 1920 à 1960, c’est parce que mes parents les chantaient.

    Je viens de songer longuement à cela lors des funérailles de ma mère. On a écouté quelques unes de ses chansons enregistrées naguère lors de fêtes de famille.

    Parmi ces chansons il y en a qui sont l’héritage de ma grand-mère et qui se chantaient au XVIIIe et XIXe. Il y a en a une dont on retrouve des versions au Québec.

    Une nièce et un neveu ont écrit une variation sur l’une des trois ou cinq cents chansons favorites de ma mère. Une variation, alternant texte et parties chantées, d’une quinzaine de minutes où ils racontaient leur grand-mère et ses chansons. On a tellement perdu l’habitude de cela, la chanson dans le quotidien, qui accompagne ou raconte le quotidien, la vie et la mort, que les gens ont applaudi. Devant le cercueil et les couronnes mortuaires.

    Sans doute m’arrive-t-il moins souvent de tomber en amour qu’en mes jeunes années mais ça m’arrive encore.

    Voici peu j’ai redécouvert La Mal Coiffée et j’ai eu le coup de foudre pour « La cambra es alandado ».

    Et puis, un peu plus anciennement mais ça reste récent, j’ai éprouvé le besoin d’écrire que des chansons comme « Le p’tit gars du Minnesota » ou « Murs » m’ont laissé raide amoureux comme à vingt ans.

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