J’écoutais l’autoradio tel un Eddy Mitchell menotté sur la route de Memphis. Mais je ne suis pas Eddy et la route n’allait pas plus loin que Berne, Suisse. J’écoutais une émission du coin et notamment l’interview de deux coqueluches actuelles de la chanson française (tendance variétés pop), Albin de la Simone et Juliette Armanet.
Interrogés avec pertinence, finesse et simplicité* sur leurs carrières respectives et leur façon de concevoir la chanson, ils furent aussi conviés à chanter quelques titres au piano, en direct. On put alors apprécier leurs voix étriquées et très peu sonores, « feutrées » diraient de moins mauvaises langues. On passera volontiers sur l’absence de puissance et de technique (après tout on n’est pas à l’opéra), mais le manque d’énergie, pour ne pas dire la mollesse, laisse quand même un peu pantois. Albin de la Simone, qui cause quasiment plus fort qu’il ne chante, expliqua que pour l’enregistrement de son dernier album il avait étouffé le piano sous une couverture (!) pour obtenir le son qu’il désirait. Je me suis dit qu’il avait dû en avaler un bout par la même occasion ! Il parla aussi de son parcours, expliqua qu’il avait commencé par le jazz et que pour cette raison il avait horreur de l’expression « jazzy », surtout appliquée à la chanson.
« Vous n’aimez pas Claude Nougaro alors ? lui demanda perfidement le journaliste.
– Si bien sûr, répondit-il (dans ce métier il est impossible de dire qu’on n’aime pas un « collègue », même mort !), mais seulement quelques chansons du début, des années soixante. »
C’est évidemment son droit le plus strict, et il précisait par ailleurs qu’il adorait « l’auteur » Nougaro, mais le hasard faisant bien les choses l’émission suivante, consacrée à « l’été en chanson », diffusa d’entrée Un été par Claude Nougaro, précisément… La voix de Nougaro, après celles des deux coqueluches pop à la française, fit l’effet d’une déflagration dans la voiture ! Une sorte d’explosion d’énergie vocale !
On a beau se dire que la chanson n’est pas qu’une histoire de « belle » ou de « bonne » voix, et surtout pas de puissance, il faut bien reconnaître qu’il y a des voix qu’on écoute plus que d’autres. Des voix qui donnent envie de suivre les paroles, à la différence de celles des deux coqueluches évoquées plus haut, dont les chansons me tombaient de l’oreille à force de ne comprendre qu’un mot sur trois, notamment quand la donzelle Armanet chantait. Ce que lui avait fait d’ailleurs habilement remarquer le présentateur en lui demandant si pour elle les mots devaient avant tout se fondre dans la musique, comme un instrument (ce à quoi la donzelle avait répondu : « Tout à fait ! »), une élégante manière de dire qu’il n’avait rien compris non plus ! Mais la chanteuse semblait de son côté dire que cela n’avait pas d’importance, alors… pourquoi chipoter ?
Nous approchions de Berne, et je me suis pris à regretter les chanteurs du gabarit de Nougaro et même à regretter un peu la variété du style Eddy Mitchell, c’est dire… Sur la route de Memphis… la la la la… sur la route de Memphis.
Pierre Delorme
* Ce qui change des émissions françaises où les présentateurs essaient au mieux de faire les malins, et au pire de jouer les intellectuels.
Deux découvertes dans un seul billet. Un baril de lessive AVEC un cadeau bonus. ;o) Merci Pierre !
Visite à Youtube.
J’avais vu passer le nom sans connaître l’œuvre. Albin de la Simone chante — sussure serait un verbe mieux approprié — « Le grand amour ». Bon, ce sera un coïtus interruptus pour moi. Dur de tolérer ça plus d’une minute.
Mais, ça tombe bien, voici Juliette Armanet. Comment ai-je pu vivre sans connaître le nom de cette donzelle ? Elle chante « L’amour en solitaire » entendu que la damoiselle n’attire guère les damoiseaux avec sa voix de souris asthénique suçant des anti-dépresseurs. Une autre chanson se plaint du « Manque d’amour » et il faut bien dire que l’on n’a pas plus de miséricorde que pour Macron glosant sur les ouvrières, les alcooliques, les négresses et autres gens qui ne sont rien.
C’était dans une voiture … Ça ne se prête pas forcément à bien entendre une voix peu puissante. J’ai du mal à écouter de la musique en voiture, j’ai l’impression d’en rater la moitié (sauf radio Nostalgie, je connais par coeur tout ce qu’ils passent, je peux même continuer la chanson quand on passe dans un tunnel, très pratique).