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FabulettesJ’ai un faible pour les fables. J’aime bien Jean Duino. Donc quand ce dernier a annoncé la parution de ses Fabulettes alexandrines, j’ai souscrit des deux mains et des deniers aussi. On notera que la fin de la phrase précédente compte douze pieds avec césure à l’hémistiche. Je ne serai donc pas sorti indemne de la lecture des trente histoires d’animaux – l’homme, d’ailleurs peu présent sinon en filigrane, comptant pour l’un d’entre eux – réunies dans ce recueil. Ou plutôt ordonnées en trois parties qui font écho à notre monde de terre (L’Ecureuil et la pomme de pin, L’Homme et le magot, La Puce et le vieux chien…), d’eau (Le Tourteau, la rascasse et le maquereau, Le Congre, la murène et le grondin…) et d’air (Le Busard et la pie, La Mouche tracassière…), placée chacune sous le patronage d’un des trois plus grands fabulistes de tous les temps : Esope, Florian, La Fontaine.
Le plaisir de l’auteur respire de partout – cela dit, on imagine mal quelqu’un composer cette sorte de saynètes par amour du pensum ou goût de la corvée. Jean Duino a soigné l’allitération (« Lançait des cris perçants, pourchassant le moustique », p. 60), peaufiné l’enjambement (« Le poète, ahuri, s’indigne et brame au crime / De lèse-poésie devant ces asticots », p. 50). Ailleurs, il reprend les choses où La Fontaine les a abandonnées : « Après que la fourmi eut laissé la cigale / Par-devant le buffet méditer sa fringale / Elle s’énamoura, de manière grotesque, / D’un étrange animal du genre éléphantesque ! / […] » (p. 10). Les morales, quand il y en a, font dans la tradition. En voici une à ressortir le prochain décembre en même temps que les manteaux : « Pourtant, il y a toujours par temps électoraux / Beaucoup de postulants : un seul, c’est déjà trop ! » (p. 38).
Plaisir toujours, mais malin cette fois (du moins, je le soupçonne) du côté du vocabulaire. En quittant L’Assemblée des coquillages, où vous aurez côtoyé le « couteau, la telline, la petite arapède et son chapeau chinois, la coque, la datte, la clovisse… », vous en remontrerez à l’écailler du coin. Butant ici ou là – pour moi, ce fut, entre autres mots savants ou rares, sur scorpénidé, férin, escarbot –, vous en appellerez peut-être au dictionnaire. Pour gabian, favouille, tian, pigne, vous pourrez solliciter un ami familier du français du Sud.
On l’aura compris, les fabulettes de Jean Duino ne s’adressent pas vraiment aux pitchouns (les petits en français du Sud), mais après tout les fables de ses glorieux aînés, non plus. En revanche, les drôles (synonyme de pitchouns en français du Sud) apprécieront les aquarelles de Gatou. Il y en a même une un peu coquine – non, je ne vous dirai pas à quelle page !

René Troin

 

Jean Duino (textes), Gatou (illustrations), Fabulettes alexandrines, éd. Onésime 2000.
72 p. En bonus, un CD reprenant 13 fabulettes lues par Catherine Salviat (sociétaire honoraire de la Comédie-Française). Prix 16 € (+ 4 € de port).

 

Jean Duino, auteur-compositeur-interprète, a enregistré trois CD. Le plus récent,
Epoque épique, a été chroniqué dans nos pages.

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