![Plutôt que le Penseur de Rodin, j’ai choisi une photo de Jean-Pierre Brisset (1937-1919), commissaire de surveillance administrative en gare d’Angers Saint-Serge et fou littéraire. En 1913, Jules Romains et ses amis le firent « prince des Penseurs ». Invité par eux à l’hôtel des Sociétés savantes, il en profita pour leur expliquer (que dis-je ? pour leur prouver) que l’homme ne descend pas du singe mais de la grenouille dont « les cris [...] sont l’origine du langage humain ». Le Brisset sans peine (éditions Deleatur, 2001 ; rééd. Ginkgo, 2005) est un réjouissant résumé de son œuvre. (Photo : DR)](http://www.crapaudsetrossignols.fr/wp-content/uploads/Brisset.png)
Plutôt que le Penseur de Rodin, j’ai choisi une photo de Jean-Pierre Brisset (1837-1919), commissaire de surveillance administrative en gare d’Angers Saint-Serge et fou littéraire. En 1913, Jules Romains et ses amis le firent « prince des Penseurs ». Invité par eux à l’hôtel des Sociétés savantes, il en profita pour leur expliquer (que dis-je ? pour leur prouver) que l’homme ne descend pas du singe mais de la grenouille dont « les cris […] sont l’origine du langage humain ». « Le Brisset sans peine » (éditions Deleatur, 2001 ; rééd. Ginkgo, 2005) est un réjouissant résumé de son œuvre. (Photo : DR)
D’abord, j’étais plutôt d’accord avec Pierre. Et puis, j’ai lu l’avis de Floréal, et ça m’a fait penser qu’une chanson au moins m’avait fait réfléchir. C’était l’été de 1965. Christophe chantait à la radio qu’il avait dessiné le doux visage d’Aline sur la plage, mais qu’au premier orage… Vous connaissez la suite. J’ai attendu la rentrée pour interroger mon prof de physique. Et c’est là qu’il m’a expliqué qu’il valait mieux graver dans le marbre le joli minois de Nicole. Bon, parce que cette année-là, j’avais plutôt Nicole comme prénom féminin dans la tête – la suite relève de la faculté de transposition, c’est facile, ça ne demande pas beaucoup de réflexion.
Pour des choses plus graves que la gravure, je me demande si ça vaut le coup de trop réfléchir quand ça chante. Réfléchir vraiment, je veux dire. Jusqu’à changer d’idée sur un sujet. La peine de mort, par exemple. Sûr que vous qui me lisez, et que je soupçonne de ne pas partager sur la question les idées de Marion Anne Perrine (c’est beaucoup moins « vendeur » que Marine, mais c’est bien la même), vous aimeriez entendre dans le poste
Le Condamné à mort par Hélène Martin, par Marc Ogeret, par Etienne Daho même, des fois que ça ferait réfléchir quelques sans-jugeote. Mais, à l’heure où
La Famille Bélier triomphe au cinéma et (r)amène Michel Sardou dans des millions d’oreilles, apprécieriez-vous tout pareil que la radio ressorte
Je suis pour ?
Franchement, la chanson, il me semble plus sage d’en attendre, au mieux, une étincelle. Du genre qui allume la curiosité ou provoque le débat ou aide à rouvrir un dossier. Pour ce qui est de la curiosité et du débat, j’ai déjà raconté le déclic provoqué chez certains jeunes adolescents des années 60 par
Nuit et Brouillard,
L’Affiche rouge ou
La Loi de 1920 (ce titre-là, moins connu que les deux autres, est d’Antoine)*. Pour les dossiers, on peut citer
Hurricane (1975), de Bob Dylan, qui popularisa la cause de Rubin Carter** au-delà des frontières étatsuniennes.
Ferrat, Ferré, Antoine, Dylan… On est là en terrain engagé ou protestataire connu. C’est quand elle surgit où on ne l’attend pas que la faille est plus belle. Au cœur du Top 50, par exemple. Oui, cette machine à matraquer
« les p’tits clous » à coups de
« Besoin de rien, envie de toi », de
« C’est l’amour à la plage (aou cha-cha-cha) », d’
« Ai-je raison ou tort / De t’aimer tellement fort ? »… Eh bien, en 1987, dans ses années de haut rendement, elle a laissé monter
Yaka Dansé jusqu’à la deuxième place. Un titre anodin, une musique accrocheuse…, elles étaient plutôt bien cachées les paroles :
« Allons-nous laisser tout passer, tout lasser, tout casser ? / N’avons-nous là de malheur et de maux bien assez ? / Dom et Tom en bateau, tombe à l’eau Calédonie : / Qui reste Aborigène à la fin des colonies ? […] » Pour la suite, y a qu’à cliquer.
René Troin
* Lire Apprenons des chansons (rubrique « Réflexion faite »).
** Condamné par deux fois (en 1967 et 1976) pour un triple meurtre, avant d’être libéré en 1985.
Raft, Yaka Dansé (paroles et musique : Christian Fougeron).
Bravo pour le portrait de Brisset : c’était peut-être un humoriste !
Avec la théorie de Brisset, je comprends mieux l’alliance des crapauds et des rossignols… Merci pour cette chanson d’Antoine, complètement oubliée…