Les Trois Gars® (ou LTG®) n’hésitent jamais à afficher leur mauvais goût. Ainsi, l’un d’entre eux fait-il savoir bruyamment, autant que régulièrement, qu’il compte parmi les fidèles d’un jeu télévisé dont les candidats sont sélectionnés moins pour leurs connaissances que pour leur aisance devant les caméras. Au fil de ces dernières semaines, on a donc pu entendre autour de midi, et sur une chaîne du service public, que la place Saint-Marc et le palais des Doges se trouvaient à Rome, que Stendhal a écrit Le Rouge et le Blanc et, pour le sujet qui nous tient à cœur, que c’est Florent Pagny qui, « en 1960 », chantait
Je m’voyais déjà. D’abord, on rigole : c’est vrai qu’il fait plus vieux que son âge, Florent Pagny, mais quand même… Et puis on réalise que la chanson se vit au présent – et sans doute la candidate qui a pondu cet anachronisme a-t-elle vu Florent Pagny interpréter ce titre d’Aznavour à la télévision.
Pour la plupart d’entre nous, la chanson, comme d’ailleurs le cinéma, est un art sans histoire, faute d’être enseignée largement, telle la littérature, par exemple
(et encore, comme on l’a vu plus haut, c’est pas gagné !). Rappelons que, tous les dix ans ou presque, on élit une « chanson du siècle » qui n’est jamais la même ! Alors, à y penser d’un peu plus près, répondre « Florent Pagny » n’est pas si ridicule que ça. Les consommateurs ordinaires de chansons, comme les spectateurs de cinéma friands des seules nouveautés, n’accordent à ces modes d’expression qu’un vague passé immédiat qui ne dépasse pas une petite décennie et semblent donc sans héritage ni histoire.
On peut rire, s’indigner, ou encore se demander ce qu’est vraiment cette
culture générale, dont chacun se fait une idée particulière, et qui évolue au fil des générations. C’est une notion très relative, qui meurt et renaît sans cesse,
comme nous.
Et la chanson dans tout ça ? Elle vit sa vie, elle est toujours là, elle traverse sous des formes diverses les artistes et les publics. Un jour elle s’appelle Aznavour, un autre Barbara, un autre jour Pagny, un autre Camille, et ainsi de suite. Mais s’y retrouver dans tous ses avatars, ça prend la tête. Et pour ceux qui aiment la « prise de tête », il y a Le Jeu des mille euros, qui depuis des lustres agrémente quotidiennement,
à la radio, la fin de déjeuner du Français moyen. On y entend Mme et
M. Tout-le-monde répondre, sans dire d’énormités, à des questions parfois savantes. Il est vrai que le temps leur est laissé de réfléchir avant de donner une réponse. Temps qui est compté, égrené, sur un joli petit métallophone au son clair. C’est un genre de jeu où on ne prend pas les gens, ceux qui jouent et ceux qui les écoutent, pour des cons. « Banco, banco, banco ! » scande la foule… en voilà une chouette chanson. De qui déjà ? Ne vous prenez pas la tête. Elle n’est pas très raide, cette question-là.
LTG
Des fois la petite lucarne laisse aussi une petite place pour la chanson : https://www.facebook.com/video.php?v=773013412738476