Sur mon Teppaz, j’ai écouté Les Mots du vocabulaire par Denise Benoit. Quand on en vient à se remémorer les interprètes historiques de Pierre Louki, on se souvient plus facilement de Lucette Raillat (La Môme aux boutons) que de Denise Benoît. Comédienne de théâtre classique (Tartuffe, mis en scène par Jean Anouilh, en 1952) et contemporain (Auprès de ma blonde, de Marcel Achard, en 1946), fine diseuse (elle a prêté sa voix à de nombreux disques de théâtre et de poésie), Denise Benoît a entamé, en 1954, une carrière de chanteuse, jalonnée d’une vingtaine de disques (78, 45 et 33 tours) souvent autour d’un thème unique (Montmartre en 1900, Humour et poésie) ou d’un seul auteur. C’est sur le 45-tours Denise Benoît chante Pierre Louki que l’on trouve Les Mots du vocabulaire. Une ronde lente, douce-amère, réglée par un horloger (c’était le métier de Pierre Louki) familier du dictionnaire, qui égrène, vers à vers, l’art de dire « Je t’aime » en silence – avec deux [s], tels ceux qui sonnent ici comme des secondes : « Aussi, aussi, j’ai décidé de me taire / Ceci, ceci pour t’éviter les soucis […]. »
Sans doute la voix de soprano de Denise Benoit n’est-elle plus tout à fait de saison en 2014, on aimerait pourtant l’entendre chanter des auteurs souvent
repris – Mireille et Jean Nohain, Brel, Brassens ou Charles Trenet – mais surtout deux autres, plus rares : Minou Drouet et Roland Bacri, le Petit Poète du Canard enchaîné. Si quelqu’un, qui nous lit, a ça dans un coin (coin)…
René Troin
I.L.D. a publié Denise Benoit – Humour et poésie. Ce CD de la collection « Les Trésors oubliés de la chanson » compte 25 titres enregistrés par entre 1955 et 1960 (dont trois de Louki et quatre de Ricet Barrier, mais rien de Bacri ni de Minou Drouet).
Denise Benoit, Les Mots du vocabulaire (paroles : Pierre Louki – musique :
Jean Lemaire), 1959.
Pourquoi une soprano ne pourrait-elle pas chanter cette délicieuse chanson de Louki. C’est indémodable justement parce que démodé. La conclusion pour moi = quand c’est trop : c’est plus…
La grande Cathy Berberian elle aussi soprano chantait bien des chansons des Beatles.
Euh… Marie-Françoise, j’ai juste écrit qu’on n’entendait plus guère ce genre de voix dans la chanson, aujourd’hui. Pas que j’interdisais aux sopranos de chanter Louki ou qui que ce soit, contrairement à certaine personne – dont le prénom composé m’échappe – que j’ai entendue à maintes reprises dire qu’elle haïssait les ténors:-)
Oui c’est vrai, on n’entend plus guère de « voix » venue du « classique » chanter des chansons à textes… sauf qu’au détour d’un spectacle vu hier soir dans un petit village du Maine-et-Loire j’ai entendu Grabriella Barranechea, chanteuse chilienne… Elle est aussi à l’aise et sans effets de voix, tout en restant elle-même, dans un répertoire classique (Carmen, Offenbach…) que dans la comédie, et la chanson à texte… car elle dit : « Il n’y a pas de frontière entre le classique, la chanson à texte et la comédie. » Je laisse ci-dessous l’adresse de son site…
http://www.gabriela-barrenechea.fr/biographie.html
La preuve, par Victor Hugo, Julos Beaucarne et José Van Dam…
http://youtu.be/HRLk8ixAmNs
Un spectacle tout récent peut illustrer cette possibilité de construire des ponts à double voix-voies. Il s’agit de celui imaginé par Jehan et Caroline Alonzo qui mêlent une voix grave, masculine et sans vibrato, avec une voix de formation classique (trois octaves !), féminine et délicieuse, pour mélanger et interpréter deux auteurs aussi différents qu’Allain Leprest et Anne Sylvestre. Leurs deux voix s’entremêlant pour un résultat aussi surprenant que judicieux.
Il est vrai aussi que ce choix fait grincer quelques dents…