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ConteNoel

Il était une fois, en ce temps-là, en Orient, trois mages que tous les amoureux de chant et de musique considéraient comme les maîtres incontestés en ces matières, tant ils avaient su allier, du temps de leur splendeur, des mélodies propres à satisfaire les goûts simples des gens du peuple avec des paroles qui ne prenaient pas ces derniers pour des simples d’esprit. Ils étaient si appréciés qu’on les appelait même, bien qu’aucun sang de haute lignée ne coulât dans leurs veines, les Trois Grands. Le premier se nommait Balthazar Brassens, le second Melchior Ferré, et le troisième Gaspard Brel.
A l’approche de la nouvelle année, nos trois mages se devaient de choisir les trois lauréats auxquels offrir les récompenses tant convoitées qu’ils avaient coutume d’attribuer chaque année à pareille époque : le disque d’or, le disque de myrrhe et le disque dansant. A cette fin, ils avaient parcouru, au long de l’année écoulée, tous les lieux où il était encore possible d’écouter de la chanson française de qualité (CFQ). Toutefois, avant de parvenir au pays des merveilles de la chanson à texte, ils avaient souhaité revoir quelques lieux marquants de leur folle jeunesse.  Ils partirent de nuit, Gaspard en tête, regardant le ciel et qui semblait savoir où il allait. Lorsque Balthazar et Melchior s’inquiétaient de la direction prise, Gaspard les rassurait, répétant : « Telle est notre quête, suivre l’étoile. » Leur périple les amena d’abord à Ostende. Mais sur la ville tombait la pluie, si bien que l’un d’eux, Melchior, en eut le moral atteint, l’amenant à se poser de sombres questions existentielles, savoir si ça vaut le coup de vivre sa vie, tout ça… Ils s’en furent donc pour Amsterdam, s’aventurant dans une taverne du port qu’ils quittèrent bien vite, Gaspard étant incommodé par une forte odeur de poisson s’incrustant jusque dans le cœur des frites. Melchior et Gaspard, les plus torturés, proposèrent alors de fuir la grisaille et de se rendre à Sète, au pays natal du troisième larron. Mais Balthazar se foutait bien d’aller là ou ailleurs. Pour lui, seuls les imbéciles heureux étaient nés quelque part. Ce qui lui importait, qu’il se trouvât à Rome ou à Zanzibar, c’était les copains d’abord.
Ils prirent alors la route aux quatre chansons pour voir et entendre ce qui se faisait de beau et d’un peu nouveau sur les scènes de France. Ils passèrent en maints endroits, s’attardant à Barjak dans le désert du Haut-Gard, devisant du bénévolat au Forum Léo-Ferrat d’Ivry-la-Noir-et-Rouge, se posant aux Rancys où l’on chante à tout bout d’champ comme des lions, découvrant un petit bijou chez une petite mère à Toulouse. Et ainsi de suite…
A l’approche de la date où leur choix devait s’opérer, ils avaient pratiquement tout vu, tout lu aussi de ces publications confidentielles et des sites internet consacrés à la chanson. Ils se réjouirent d’ailleurs de découvrir de charmants crapauds et rossignols dont les coassements et les chants mélodieux étaient venus depuis peu dépoussiérer la Toile chanson et ses propos convenus et laborieux. Ils s’attristèrent toutefois de constater que trois académiciens chagrins de la CFQ – qu’en riant ils nommaient entre eux « les trois baudets » –, en dévalorisant le travail de quelques jeunes artistes par eux fort appréciés, s’ingéniaient, en ce qui les concernait, à démentir avec force le titre d’une belle chanson :  On s’ra jamais vieux.
Vint enfin l’heure du palmarès ! Le disque d’or fut remis à Delphine Coutant ; le disque de myrrhe à Pierre Lebelâge ; et le disque dansant à Dimoné. Tous les crapauds et les rossignols français, enchantés, coassèrent et chantèrent à l’unisson jusqu’au matin.

Floréal Melgar   

 

1 commentaire »

  1. Chris Land dit :

    Suis un peu étonné que les itinéraires tracés en bleu ou en rouge ne se croisent pas… et j’ai craint un moment qu’ils ne se rejoignent qu’à Compostelle…
    Eh oui, les crapauds et rossignols ne sont pas disposés à cesser de coasser et rossignoler à pleins poumons !
    Petit détail, mais pas anodin, la ville de départ de Melchior est pavoisée de rouge et noir, pas l’inverse, vu ?

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