Sur mon Teppaz, j’ai écouté Deux amoureux de plus par Patrick Samson. Un slow-surf, danse hybride dont les pas se sont perdus, comme ceux « des amants désunis ». Bien sûr, on n’est pas ici tout à fait au niveau de Prévert. Les paroles roulent leur lot de clichés à base de mouettes s’envolant « en poussant de grands cris », de courses « sur le sable » et de nuages jouant « avec le vent ». On n’en relève pas moins des « embruns » et un « tu tombas » qui viennent nous rappeler que dans la deuxième moitié du siècle dernier, les paroliers – même à la chaîne – maniaient le vocabulaire et la conjugaison littéraires. Le chanteur, lui-même, ne manquait pas de répondant. Né à Beyrouth, Sulaimi Khoury (son véritable état civil) ne maîtrisait pas moins de six langues : le libanais, l’anglais, l’espagnol, le français, le grec et l’italien. Sa carrière française est à peu près aussi brève que la notule que lui consacre le « Trombinoscope des copains* ». Outre ses pays et année de naissance, elle précise les noms des Phéniciens : Soussou Roy (guitare solo), Little John (guitare rythmique), Tony Fegha (guitare basse) et Lezmer Gaby (batterie). Ce groupe, qui accompagnait Patrick Samson sur son premier 45-tours français, ne joue plus ici que les utilités, et c’est Christian Chevallier qui signe les arrangements – dont des chœurs opulents. Il faut dire que le « côté rock** » de cette bande de « meilleurs copains » a du mal à passer. Quand ils les voient en première partie du Musicorama de Chuck Berry, le 7 février 1965, les purs ont la dent dure : « […] Patrick Samson et ses Phéniciens […] ne parvinrent pas un seul instant à nous faire croire à leur valeur. Leur interprétation de Long Tall Sally déclencha quelques réactions peu courtoises mais justifiées***. » Au tournant de l’année 1965, le chanteur polyglotte franchira les Alpes pour connaître, en Italie, un succès durable****. Dans la langue de Dante et de Rita Pavone, il enregistrera notamment Un grosso scandale et participera au festival de San Remo. J’écrirais bien que ça fait à Samson deux points communs avec Dalida. Mais ce serait conclure la première saison de ces chroniques sur un jeu de mots trop navrant.
René Troin
* Salut les copains n° 47, p. 8.
** Les deux faces de son troisième 45-tours Philips se partageaient entre « Le côté “SLOW” de Patrick » et « Le côté “ROCK” de Patrick ».
*** Disco Revue n° 7 (mars 1965) – cité par le blog Surfinbird (rubrique « 60’s Beat »).
**** On en saura davantage en consultant sa fiche Wikipédia (en italien).
Patrick Samson, Deux amoureux de plus (paroles : Armand Seggian – musique : Maurice Falconier et Paul Alt), 1965.